• LA PISCINE

    LA PISCINE


    La cartoucherie

    Non loin, se trouve "La Cartoucherie", un quartier tout aussi paisible mais plus vieux, avec des maisons marquées par l'outrage des ans. Comme son nom l'indique, il a été construit pour les ouvriers et cadres de l'usine. Il se compose donc, aujourd'hui, d'habitations à plusieurs étages bordant des rues étroites et de quelques vestiges de villas du troisième empire au prestige, depuis longtemps, disparu. C'est dans l'une d'elles que siège le Purgato de la ville. Le Purgato, est totalement inconnu des mortels et pour cause ! C'est un diminutif officialisé, depuis plus d'un siècle, de Purgatoire. Une sorte de commissariat de Police de l'au-delà. Chaque ville possède le sien. C'est ici que les âmes en cours de rachat sont incorporées pour se voir confier des missions purificatrices. Il n'y a aucune raison pour que l'agglomération de Launel échappe à la règle. La célébrité du Purgato de Launel est planétaire car c'est dans cette ville que se vénère le souvenir de Natacha Jammet, voyante célèbre de 1870, qui fit les grandes heures de la communication avec les esprits. Cartomancienne hors pair, elle maîtrisait tout, le pendule, l'écriture et les tables tournantes avec une adresse sans pareille et une efficacité redoutable. C'est bien simple, pour tous les esprits reconnaissants, elle est la Jeanne d'Arc du spiritisme, la Bernadette Soubirous de l'au-delà ! On ne compte plus les services rendus aux familles, aux veuves et parfois même à la police pour entrer en contact avec les défunts. Bref, elle était déjà, en quelque sorte, l'Internet des cimetières ! Elle a pourtant subi une fin assez pénible, assassinée dans la villa qu'elle venait de se faire construire à grands frais, elle a été enterrée secrètement par son bourreau dans sa serre. Son corps n'a jamais été retrouvé. Grâce à sa gentillesse et ses services rendus une vie durant, elle a obtenu un aller simple pour des cieux plus cléments. Restait son corps, gisant dans la serre de son ancienne maison… La villa Mauresque. Mais si le commun des mortels ignore où se trouve sa dépouille, il n'en est pas de même pour toutes les âmes tourmentées qui la vénèrent depuis plus d'un siècle et qui ont fait de cet endroit un lieu de culte et de pèlerinage. Par conséquent, il n'est pas question de toucher à ce lieu de recueillement et encore moins de laisser s'installer des casse-pieds ayant des idées rénovatrices.


     


    L’origine de "La piscine" est une conjugaison de plusieurs sentiments.

    Le déclic s’est fait par ma vie de famille avec ma femme et mes enfants où j’avais notamment remarqué l’incroyable lien qui pouvait unir une mère et son fils, la douceur des sentiments et leur complicité. Outre mon expérience personnelle, je me suis rendu compte, par la suite, que ce n’était pas un cas isolé.

    Il me fallait donc l’écrire.

    Pour le cadre j’osais la beauté ; passionné de troisième empire et des audaces architecturales du début du siècle il me fallait une villa comme l’on dit si couramment "Victorienne" ce qui revient au même. Car en fait, pour moi, c’est l’exemple type "du beau", un mariage d’élégance et de grandeur. Cette femme, séparée de son mari au sein d’une époque qui va gaiement vers le modernisme et le bio dégradable n’hésitera pas à faire le bon choix en achetant une maison qui a une âme plutôt qu’une quelconque habitation de lotissement.

    Je la voulais femme de goût.

    Enfin, en un temps où l’on s’endette pour acquérir une piscine, je démontre sa faiblesse, pour le bonheur de son enfant elle devra détruire une vieille serre, jadis une explosion de couleurs pour devenir un rectangle bleuâtre utilisé que deux mois de l’année. Ce choix douloureux financièrement, pour l’unique plaisir de son enfant, est a contrario de mauvais goût comparé à la villa et son jardin. J’aime ce genre de paradoxe.

    Mais il ne faut pas que ce projet aboutisse car la beauté doit l’emporter.

    Alors qui peut empêcher une telle folie si ce ne sont des forces surnaturelles et sous quel prétexte ?

    La réponse est dans la Piscine.

     Daniel Blanchard - Porthos